Entre les 7 et 9 janvier 2015, les attaques contre Charlie Hebdo et le magasin Hyper Cacher font 20 morts et des millions d’hébétés. Ce qui domine, dans les jours et les semaines qui suivent, est la sidération : « État d’anéantissement subit produit par certaines maladies, qui semblent frapper les organes avec la promptitude de l’éclair ou de la foudre. » Pareille sidération, amplifiée par les média et s’emmêlant à l’émotion qui s’est emparée du pays, mène à la plus grande confusion : il faut s’efforcer d’examiner ce qui s’est passé et dit avec circonspection. Et si bien des effets, de prime abord exceptionnels, se sont dégonflés aussi vite qu’ils ont surgi, ils ont pu focaliser et détourner l’attention de mesures graves, établies pour durer, telles que des lois liberticides qui donnent à la police toute latitude pour espionner la population.
C’est en ce sens que l’on pourrait parler d’un « 11 septembre français » – à cela près que la France a déjà vécu les répercussions de la destruction des Twin Towers par une poignée d’illuminés décidés au « martyre ». Dans l’hexagone, les conséquences de cet attentat cathartique ont alors été beaucoup moins extrêmes qu’aux États-Unis en matière de militarisation et de surveillance de la société – certes, mais la France rattrape rapidement ce « retard », en dépit des déclarations rassurantes de nos dirigeants sur « nos valeurs » et « notre solide démocratie ».
Cette compilation de réactions – exagérées, aberrantes, mais révélatrices, ou tout bonnement grotesque – qui sont apparues dans la presse ou sur Internet les « jours d’après » participera, nous l’espérons, à mettre au jour des vessies qu’on tente de faire passer pour des lanternes, dans ce pays cartésien et voltairien qui, face aux obscurantismes, a éteint les Lumières.